Conte protégé.
Dans
un petit village du nord de la Norvège, Nicolas et Céleste arrivèrent, comme
chaque année, début décembre. Leur venue était toujours synonyme de froid vif,
de journées courtes et de premières neiges. Sur la petite place centrale pourvue
de quelques échoppes, un grand sapin de Noël avait été dressé et décoré de
mille bougies et de pommes de pin colorées.
Lorsque
Céleste, la licorne, montra le bout de son museau, les cris de joie de
plusieurs dizaines d’enfants résonnèrent jusqu’au plus profond de la forêt voisine. Elle hennit et s’arrêta pour permettre à Nicolas de poser pied à
terre. Les enfants se ruèrent sur lui avec une telle ferveur qu’il tomba dans
la neige dans un grand éclat de rire. La bonne humeur régnait et le cœur de
chaque habitant du village était gonflé de bonheur et d’espérance.
Nicolas, l’un
des nombreux cousins du Père Noël, est le boulanger, confiseur et pâtissier en
chef du Pôle Nord ! Quelques semaines avant le réveillon de Noël, il passe
chez tous les enfants sages pour distribuer de délicieuses friandises qui donnent
un avant-goût sucré aux fêtes de fin d’année.
Comme son très
célèbre cousin, Nicolas est un vieil homme joufflu à la belle barbe blanche. Il
vit, depuis plusieurs siècles, au Pôle Nord dans une charmante maisonnette.
Il a fait aménager un grand four à bois et une vaste cuisine dans laquelle il
pâtisse toutes sortes de mets succulents : petits pains aux noix, pâtes de
fruits, fins chocolats recouverts de sucre glace, guimauves, gâteaux à la
noisette, caramels, pralines, cannes à sucre, pain d’épices et des confiseries aux
formes variées et aux couleurs vives. L’une de ses
spécialités est la crotte en chocolat qu’il offre
malicieusement en faisant croire que ce sont les crottes de son petit âne. Au
quotidien, sa chaumière exhale un délicieux parfum de brioche chaude que les
habitants du Pôle hument avec délice dès le petit jour.
Il y a fort longtemps, Nicolas était accompagné d’un gentil petit âne gris lors de la nuit de distribution. Mais il était vieillissant et eut, un jour, besoin de prendre un repos bien mérité. Bientôt, une jeune jument au pelage brun foncé picté de reflets gris le remplaça dans sa tâche. Céleste était la plus douce et gentille des juments qu’il ait été donné de voir.
Il
y a de nombreuses années, alors que Nicolas et Céleste quittaient le Pôle Nord
pour entamer leur périple magique, ils traversèrent la forêt enchantée des
lutins de l’hiver et entendirent des cris de dispute.
-
Céleste, tu entends ce vacarme ? Questionna
Nicolas.
La
jument acquiesça d’un hochement de tête tout en évitant de justesse une boule
de neige qui fendait l’air à une vitesse vertigineuse.
Rapidement, ils comprirent qu’un affrontement se déroulait entre Jack et Suzie. Le frère et la sœur, lutins de l’hiver dont la mission est de répandre la neige et le givre sur terre, se querellaient au quotidien pour des sujets sans importance. Toutes les raisons possibles et imaginables les emportaient dans un tourbillon de chamaillerie.
Alors
que Céleste essayait de se dégager de la bataille, Nicolas fut désarçonné par
un sort de souffle de vent d’hiver envoyé par Suzie. Il se retrouva étalé dans
la neige poudreuse et sa besace de friandises fut éparpillée au sol. Quant à Céleste,
elle n’eut pas le temps de réagir et se trouva paralysée par un sort de gel
lancé par Jack. En quelques instants, la pauvre jument fut figée dans la neige
gelée avec un éclat de glaçon torsadé collé sur le front.
C’est
à ce moment précis que les deux lutins eurent conscience de leur énorme bêtise et
arrêtèrent immédiatement de lancer des sorts à tort et à travers. Ils aidèrent
le pauvre Nicolas à se relever. S’étant remis debout avec peine, il constata le
gâchis et s’aperçut avec stupéfaction que la douce Céleste était complètement paralysée.
-
Regardez ce que vous avez fait ! Il n’y a pas de quoi être fier ! Et
comment allons nous délivrer Céleste de sa prison de glace ?
Tout
penauds, les deux lutins prièrent Nicolas de bien vouloir les excuser. Larmoyants,
ils s’écrièrent en chœur :
-
Pardon Nicolas, nous allons réparer notre bêtise. C’est promis. Mais… nous ne
savons pas comment faire !
-
Bande de petits malins, vous jetez des sorts sans réfléchir et vous ne savez
même pas comment les annuler ! Nous voilà dans un drôle de pétrin et sans
compter que les enfants du monde entier nous attendent. Vous rendez vous compte
du chagrin qu’ils auront demain matin lorsqu’ils découvriront leurs chaussettes
vides !
Jack
et Suzie regardaient le bout de leurs chaussures et ne savaient plus quoi faire.
Puis, Suzie pris timidement la parole :
-
Peut-être un bon feu de bois pour la réchauffer doucement ?
Malheureusement,
ce fut peine perdue et Céleste resta figée.
-
Nous pourrions aller chez Grand-Père Gel ? Reprit Suzie. C’est lui qui
nous a appris notre métier. Il saura sans doute comment faire pour délivrer
Céleste.
Tous trois allèrent frapper à la porte de Grand-Père Gel. Cet autre cousin du Père Noël habite un château entièrement fait de glace dont les parois parfaitement lisses reflètent la lumière du soleil et de la lune comme des milliers de miroirs. C’est lui qui dirige l’équipe des lutins des neiges et c’est grâce à lui que la saison d’hiver existe et permet à la nature de prendre du repos pour se régénérer. Une fois informé des ennuis provoqués par Jack et Suzie, il ne manqua pas de faire un long sermon leur rappelant qu’ils avaient déjà et récemment fait des ennuis au Père Noël en déposant du givre devant sa porte d’entrée. Cela lui avait valu une belle chute et la destruction de sa montre magique pour contrôler le temps lors de la nuit de Noël. Tout avait pu rentrer dans l’ordre rapidement mais là, s’en était trop !
- Je ne vous félicite pas ! Gronda Grand-Père Gel. Vous savez parfaitement qu’un sort ne peut être défait que par celui qui l’a lancé. Je n’ai donc pas la possibilité de venir en aide à Céleste sauf en utilisant la baguette de cristal !
-
La baguette de cristal ! S’écrièrent Jack et Suzie qui savaient
parfaitement que cette baguette, extrêmement puissante, ne pouvait être utilisée
que rarement sous peine de voir la terre entière se retrouver pétrifiée par le
gel éternel.
-
Je n’ai pas le choix et je vais la chercher mais je vous préviens que
cette aventure doit vous servir de leçon une bonne fois pout toute !
Jack et Suzie, très gênés promirent en se regardant l'un et l'autre.
Grand-Père
Gel s’isola quelques minutes dans son bureau et ouvrit une trappe secrète
taillée dans l’un des murs de glace puis il revint avec la baguette magique en
main. Elle était constituée de milliers de perles d’eau et brillait comme du
diamant. Puis, ils filèrent à toute vitesse retrouver Céleste.
Lorsque
Grand-Père Gel arriva près d’elle, il dit à Nicolas :
-
Je dois t’informer que je vais pouvoir délivrer Céleste mais elle ne retrouvera
plus jamais son allure d’autrefois. Son pelage restera fait de neige blanche et
le glaçon torsadé restera pour toujours incrusté sur son front.
-
J’espère juste que Céleste appréciera sa nouvelle apparence. Répondit Nicolas.
Alors, Grand-Père Gel agita avec douceur et d’infinies précautions la baguette en direction de la jument figée. Il récita une formule compliquée et des cristaux de neige pailletés entourèrent Céleste d’une lumière vive. Elle fut instantanément délivrée de sa prison de glace. Reprenant ses esprits avec la vivacité de l’éclair, elle remercia chaleureusement Grand-Père Gel. Céleste était devenue la première licorne au monde et se trouva ravissante avec son nouveau pelage et sa corne étincelante !
Par
chance, la bêtise de Jack et Suzie s’était transformée en un évènement heureux.
Depuis ce jour, on dit qu’ils sont très attentifs à ne plus causer d’ennuis à
quiconque. On dit aussi que le frère et la sœur ne se disputent plus qu’à de
rares occasions. Ils n’agissent plus sans d’abord réfléchir aux conséquences.
Quant
à Nicolas et Céleste, ils continuent à offrir aux enfants du monde entier des
friandises dans la nuit du 5 au 6 décembre. C’est une agréable façon de les
faire patienter jusqu’à Noël.
De
nos jours, c’est grâce à Céleste, devenue une majestueuse licorne, que tombent
les premières neiges. Lorsqu’elle galope à vive allure, des flocons s’envolent
de sont pelage blanc soyeux et recouvrent le sol. C’est Céleste qui offre au
monde un Noël blanc.
Maintenant,
à vous de chanter…
Chanson
américaine de 1940 par Irving Berlin. L’adaptation française est de 1949 par
Francis Blanche.
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